29.5.15

Giono, l'écriture de la Provence


Le printemps en Provence
un régal pour les peintres et les écrivains !

Nous vous présentons, grâce à Martine Estrade :

Jean Giono (Manosque30 mars 1895 - « Lou Paraïs » à Manosque9 octobre 1970) est un écrivain et un scénariste français, d'une famille d'origine piémontaise. Un grand nombre de ses ouvrages a pour cadre le monde paysan provençal. Inspirée par son imagination et ses visions de la Grèce antique, son œuvre romanesque dépeint la condition de l'homme dans le monde, face aux questions morales et métaphysiques et possède une portée universelle. La Provence que Giono déploie est une Provence hallucinée: «  ses paysages sont fabriqués de plusieurs matières : des prairies et du papier, des rochers et des songes, des sources vives et des alphabets » ( J-L Caribou).

Sa maison, La  Margotte, achetée en 1942 avec les droits d’adaptation cinématographique
de son oeuvre par un producteur, était cultivée par le fermier de Giono et l’écrivain s’y
rendait par autocar ou à vélo depuis Manosque et ravitaillait grâce à elle une tablée d’une
dizaine de personnes pendant la guerre. Il y séjournait pour écrire et se promener depuis sa
chambre à l’étage  bénéficiant d’une belle vue sur ses terres, les collines proches et les
Grandes Alpes dans le lointain. Mais ce qu’il voyait surtout de sa fenêtre c’était un très beau
chêne (aujourd’hui foudroyé) et un autre qui existe encore en contrebas de la ferme d’une
beauté et d’une ampleur de ramure exceptionnelle. il avait confié à son fermier » Je souhaite
qu’on ne l’abatte jamais même après ma mort ».
Notre jeu d'écriture :
Décrire un paysage en le faisant vivre par les couleurs, les odeurs, les bruits et même les
goûts qu'il suggère.
Martine Estrade
Odile Zeller



19.5.15

Notre quatrième et dernier extrait



Un dernier extrait à lire ... Les livres sont sous presse, encore un peu de patience et nous les aurons en main.

En attendant un extrait de Un peu plus loin à gauche d'Alix Torloi, une nouvelle inspirée par le tableau de Cézanne La route à Auvers-sur-Oise exposé au Musée des Beaux Arts du CanadaBravo Alix!

Ce texte termine nos extraits avec une double référence au Canada et à un peintre français. Nous opérons une vraie plongée dans le tableau...

Nous reprendrons ensuite notre exploration des maisons d'écrivains par celle de Giono en Provence, une introduction à l'été.

Voici l'extrait :

Quelques chaumières, à gauche et au fond. Elles ne datent pas d’aujourd’hui, se dit Julie, puis regarde le cartel. Oui, en effet, 1873-1874! C’est sans doute un petit village de campagne? Il y a un quelques arbres sur la droite, d’autres au lointain, et des touffes d’herbes gorgées d’eau. Les branches n’ont plus de feuilles, mais il fait encore relativement beau. Avec une atmosphère de fin d’automne, un je-ne-sais-quoi un peu plus sombre qui annonce la fin d’après-midi. Et surtout, au centre, ce chemin un peu boueux.
C’est une route de terre qui serpente, avant de dévier vers la gauche après la dernière maison. Mais qu’y a-t-il au bout ? C’est cela qui interpelle Julie, ce qui l’irrite, même. Comme un besoin impérieux de savoir ce qui se trouve au bout du chemin, lorsqu’il oblique. Elle se penche un peu à droite, pour essayer de mieux percevoir, mais la dernière maison bloque décidément la vue. Elle plisse les yeux, se concentre – un sentiment d’urgence la prend, comme s’il y avait quelque chose d’extrêmement important, de vital, à décrypter…C’est l’odeur qui étonne soudain Julie. Une forte odeur de feuilles humides et de bois, mêlée aux senteurs plus riches et grasses de la terre. Une odeur qui prend au nez. Son cœur bat si fort qu’elle le sent palpiter dans sa gorge, et se retourne pour vérifier : mais elle l’avait déjà compris. Elle est dans le tableau, sur la route de terre qui serpente. Elle entend des poules caqueter, vraisemblablement le poulailler d’une maison voisine, et voit ce qu’elle ne distinguait pas avant : la chaumière sur sa gauche se prolonge et il manque quelques tuiles. 



Bonne lecture !
A bientôt !

Odile Zeller








13.5.15

Notre troisième extrait



Bonjour à tous  


Voici le Coup de cœur du Jury !

Le célèbre peintre américain Edward Hopper est pour les ateliers d'écriture une source de proposition d'écriture. La vie nocturne évoquée dans le tableau "Nighthawks" a servi par exemple de déclic au roman "L'arrière saison" de Philippe Besson. La récente rétrospective parisienne a largement contribué à ce nouvel engouement pour son œuvre.

Voici un extrait de la nouvelle "Devant Office at night " de Claude Hiblot. Un dialogue vif et rapide sert de trame à la nouvelle. Je ne vous en dis pas plus et vous en souhaite une bonne lecture en avant première de notre recueil !
[…] t’iras pas chanter partout que les Frenchies ne savent pas recevoir, hein ! Tiens mon gars… camembert affiné, au lait cru, rillettes, saucisson à l’ail, jésus, rosette… et de la vraie, rien à voir avec vot’charcuterie US javellisée. Tu vas te régaler… Dis-voir, pour un cow-boy, tu parles vachement bien. Et sans accent. D’jà venu à Paris ? T’as appris où ? 
— Je n’ai pas appris. Il m’a peint comme ça. Hopper parlait français. À l’atelier, il déclamait du Baudelaire. Avant de sauter du tableau je ne me savais pas bilingue. Il m’a peint à son image. Génial ! Hopper était amoureux de la France et du français... »

A bientôt pour un dernier extrait !

Odile Zeller

7.5.15

Notre deuxième extrait


Notre  deuxième extrait :
Le prix spécial Jeunes décerné à Joanna Blin pour sa nouvelle
Eclats par touches jaunes. L'œuvre évoquée est "La tristesse du roi" d'Henri Matisse exposée au Centre Pompidou.

Joanna nous donne à lire une nouvelle poignante sur le deuil. Merci et bravo Joanna !

Voici l'extrait :



C’est la première fois que j’entre dans un musée. C’est étrange. Bruyant. Tellement coloré. Je me laisse guider. Les tableaux et les sculptures s’enchainent, je ne pensais pas apprécier autant cet amas de lignes et de touches. Je me sens glisser, emportée dans une sorte de rêve. Soudain, le cartel d’un tableau accroche mon regard. Je me tiens face à la toile. J’ai l’impression d’être devant un miroir. Qui me rejette à la figure ma triste réalité. Le roi est triste. Mon père est triste. Il est vêtu de noir. Ses larmes s’échappent et tourbillonnent autour de lui. Il est assis, recroquevillé sur lui-même. Serrant contre sa poitrine les vestiges de la passion de ma mère. Plus jamais elle ne chantera. Ni ne jouera. Ma vie n’est qu’éclats de verre, brisures.